• Voici une "petite" réflexion que m'a inspiré un stage proposé par l'Education Nationale, un de ces nombreux stages où l'on se rend toujours avec l'espoir de découvrir des moyens d'améliorer nos pratiques d'enseignant et d'où l'on revient toujours en se disant qu'on aurait mieux fait de rester avec nos élèves parce qu'au moins on n'aurait pas perdu de temps.

    Nous y allons en effet dans l'espoir d'apprendre des choses CONCRETES et UTILES or on nous assomme avec un charabia pédago-didacto-intello dont nous ne pouvons rien faire en pratique ! On passe 7 heures à écouter des gens, des experts, docteurs en ceci, spécialistes de cela, nous déballer leur science en employant les mots les plus barbares possibles afin de montrer qu'ils maîtrisent bien leur sujet, mieux que nous puisque ces mot-là on ne les connaît même pas ! Les dirigeants croient-ils sincèrement à ce charabia ?

    Chaque année, nous découvrons de nouveaux sigles prometteurs, porteurs d'une nouvelle méthode miraculeuse qui nous permettra de devenir de meilleurs enseignants ! Et tout le monde semble y croire en plus, chaque année ! Alors qu'on sait bien que dans un an, deux, trois au maximum, on annoncera que le procédé miracle n'a pas fonctionné... comme par hasard juste au moment où l'on commençait à comprendre comment il fallait le mettre en place. Alors, même si nous commençons à nous dire que ça peut marcher, on nous dit "STOP !" et il faut tout arrêter mais non parce que ça ne fonctionne pas (à l'EN on ne parle jamais d'échec)  mais juste parce qu'un pédagogo je ne sais quoi a trouvé mieux : quelque chose de miraculeux qui marchera beaucoup mieux et bla bla bla... PADI, IDD, ATP, AI, PPRE... sous ces sigles la même chose à chaque fois : le constat de la non réussite de certains élèves. On va donc leur fabriquer un nouveau programme personnalisé (très à la mode la l'individualisation de l'élève !)... afin de le soutenir, de lui apprendre autrement, de le faire réussir différemment. On s'engage à fond là-dedans. On est motivé (l'élève moins en général). On passe des heures à réfléchir aux meilleurs moyens de le mettre en confiance pour le remettre à flots. On lui explique patiemment qu'on va tout faire pour l'aider, qu'il finira bien par réussir là où jusqu'à présent il a toujours échoué et on lui fait croire monts et merveilles. Au final, par manque de moyen, de temps et parce que le problème de l'élève se situe à un autre niveau, ce dernier constate que ses résultats sont toujours aussi catastrophiques... alors, en haut lieu, on nous demande de continuer quand même pare que toute expérience pédagogique est une bonne chose pour l'élève ! Même s'il a juste accepté de rester 30 minutes assis dans son année c'est une victoire ! Alors on s'investit, on se casse la tête pour trouver des "projets inovants", on passe des soirées entières à peaufiner des trucs et des machins auxquels on croit à fond !

    Et puis, l'année scolaire suivante, on se dit qu'on pourra au moins s'appuyer sur ces acquis, sur cette expérience déjà menée... eh bien non ! On nous annonce que "finalement, il faut laisser tomber ces projets... pour se lancer dans un autre mais alors très prometteur celui-là". On met donc au placard nos trouvailles et notre travail d'une année et on est reparti pour se creuser les méninges afin de coller au nouveau projet. Et rebelotte, on promet aux élèves que ça va marcher, on y croit, on se donne à fond... et ça ne marche encore pas... Parfois, en tant que professionnel sur le terrain, on aurait bien des idées mais hélas elles ne rentrent pas dans le cadre du projet ministériel... donc, interdiction de les essayer... Et puis d'abord, qu'est-ce qu'on y connaît nous aux élèves ? Laissons ces missions aux VRAIS spécialistes, ceux qui n'ont jamais mis les pieds dans une classe, qui n'ont jamais approché un ado en difficulté  de leur vie !

    L'autre jour, nous avons constaté que nous essayions depuis le mois de septembre de mettre en place un "dispositif" comme on dit sans que jamais on ne nous explique de quelle façon fonctionnait ce dispositif, ce qu'on pouvait y faire, mettre en oeuvre, les moyens qu'on avait, ceux qu'on n'avait pas et que finalement PERSONNE ne met en pratique ce dispositif de la même façon, personne ne sait même en quoi il consiste. Les informations, on les aura peut-être l'an prochain mais en attendant, nous devons déjà aider les élèves grâce à ce nouveau moyen. On est dans le flou le plus total et personne n'est capable de nous en dire plus. Alors, comme d'habitude, on fait ce qu'on peut, le mieux qu'on peut avec ce qu'on a puisque de toute façon, dans un an, deux ou trois, une fois qu'on aura compris en quoi consistait ce dispositif, il faudra l'abandonner pour se lancer à coprs perdu dans un autre, affublé d'un nouveau sigle, prometteur de réussite et aussi flou qu'une photo ratée.


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  • "Il est dangereux d'admettre le public dans les coulisses. Il perd facilement ses illusions, puis il vous en tient grief car c'est l'illusion qu'il aime" (Somerset Maugham)

     

    Citation intéressante que celle-ci. Elle met en lumière cette espèce de fascination pour l'aveuglement dont nous faisons preuve dès qu'il s'agit de nos idoles. Passer derrière rideau est souvent un traumatisme pour l'admirateur et pourtant quel est l'admirateur qui n'en a jamais rêvé ?

    Je suis fan depuis des années de Claude François et pendant très longtemps, je l'ai idéalisé. Bizarre de chercher à oublier le côté humain de l'artiste... Un peu comme si on espérait inconsciemment qu'il existe effectivement des êtres parfaits, des demi-dieux, des références, des modèles... comme pour se rassurer d'être aussi imparfaits peut-être, se raccrocher à l'idée que la perfection existe. A moins que ce ne soit tout simplement pour conserver ces instants d'enfance, ceux où l'on croyait encore à la perfection des adultes, ceux où nos parents apparaissaient comme des super héros, prêts à tout pour nous protéger des dangers de la vie. Il ne nous serait même pas venu à l'idée de douter de leur super puissance et pourtant... Un jour, on s'aperçoit qu'ils sont comme nous... qu'ils croulent sous les doutes et qu'ils font simplement ce qu'ils peuvent, comme ils le peuvent, et que parfois même s'ils font au mieux ce n'est pas suffisant. Alors pour compenser, on se tourne vers les artistes, ces êtres de lumière, beaux, talentueux, adorables, souriants... Claude François c'était tout ça ! L'image de la perfection Pas question alors de revivre le traumatisme connu avec les parents ! On veut conserver intact ce nous super héros qu'on s'est trouvé ! Interdiction à qui que ce soit d'écorner l'image de la perfection qui nous permet d'être à nouveau rassuré, comme avant...

    Et pourtant... on finit par prendre conscience que nul n'est parfait, pas même nos héros de lumière. On rêve de les rencontrer mais c'est avec la trouille au ventre qu'on y va si on en a l'occasion parce que l'illusion peut s'effacer définitvement parfois. Alors comme le dit Maugham, on en veut à l'artiste. Cependant ce n'est pas à lui qu'il faudrait en vouloir. Certes il a construit une image de perfection pour nous envoûter mais si nous avons marché dans la combine c'est que nous le voulions bien. Il ne faudrait jamais rencontrer ses rêves si on n'est pas certain d'accepter la dure réalité.

    J'ai longtemps cru ainsi que Claude François était la perfection et j'imaginais que tout s'effondrerait si la réalité n'était pas conforme à mon rêve. Et puis, en grandissant, en vieillissant, en apprenant à ouvrir les yeux j'ai découvert que finalement ce sont toutes ces imperfections qui faisaient de lui quelqu'un de vraiment admirable. Le super héros avait laissé la place à un être humain qui a su gérer au mieux ses défauts, une peu comme Baudelaire savait tirer "les fleurs du mal". N'est-ce pas cela qui mérite vraiment l'admiration ? Et du coup, nos parents, bien souvent, rentrent aussi dans cette catégorie... des gens bien qui ont fait au mieux. On peut porter sur eux un regard lucide mais admiratif et reconnaissant. Ils ont fait de nous ce que nous sommes : des êtres imparfaits qui à leur tour feront de leur mieux avec leurs défaillances et leurs atouts.


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  • Voici un texte qui aurait pu être le début d'un roman, qui aurait dû l'être même mais je ne suis pas allée beaucoup plus loin... J'en ai plusieurs comme ça... bizarre que ce projet n'aille jamais au bout.
    Une fenêtre éclairée, une chambre allumée, une présence dans la soirée, tard dans la nuit aussi. Et puis, les volets qui se ferment, il est minuit, une heure ou même deux… Je ne dors pas, j’attends, j’observe de temps en temps… Je surveille, je veille… je me lève plusieurs fois pour juste apercevoir cette lueur dans la chambre et puis une fois que les volets sont fermés je m’endors, rassurée. Je dormirai bien. Je respire, j’ai le cœur plus léger, enfin… Toute la soirée, j’ai craint qu’il ne sorte de chez lui, que la lumière s’éteigne et qu’il ne ferme pas ses volets avant l’aube…
     
    Dans ces cas là, la nuit était horrible… peuplée de cauchemars et d’angoisses. L’attente du lendemain où, dès le petit jour, j’allais me renseigner… essayer de savoir où il était cette nuit, comprendre son absence. Une autre angoisse si j’apprenais qu’il était en boîte de nuit ou au cinéma. Un soupir de soulagement s’il était simplement dans le salon en train de regarder la télé. Obsessionnelle angoisse ? Certainement. Folie latente ? Possible. Une douleur intense, réelle, lancinante… la douleur du doute et plus que tout la crainte de l’abandon comme si une seule nuit d’absence pouvait me rayer de son esprit, de son cœur et de sa vie. C’était un mal que je ressentais physiquement, une atroce douleur diffuse mais tellement présente. Impossible à calmer. Impossible d’oublier qu’il était quelque part, dehors, avec des gens fascinants qui lui feraient oublier jusqu’à mon existence. C’était une évidence. Chaque sortie, chaque soirée passée dehors lui permettrait de me rayer de sa vie. Je n’ai jamais compris ce sentiment, je ne l’ai jamais vraiment accepté non plus. Honte. Regrets. Remords. Incompréhension. Panique. Désespoir. Jamais il ne devait le savoir, il aurait cru que j’étais mentalement dérangée. Etait-ce le cas ? Peut-être. Pourtant j’avais conscience de cet état d’esprit et de tout ce qu’il y avait d’anormal à penser ainsi, à être ainsi. Mais j’étais incapable de me contrôler. Etait-ce simplement l’effet de la jalousie ou bien cela allait-il plus loin ?
     
     J’aurais tout donné pour que ça s’arrête, pour que cesse la douleur et pour que la sérénité revienne en moi. Même en sa présence, il me manquait déjà et je craignais déjà la nuit suivante. Je savais que j’allais encore la passer à veiller, surveiller et m’angoisser. Terreur nocturne. Abandon inévitable et définitif. Ma vie serait devenue vide sans lui, je n’aurais plus eu de raison de vivre, plus aucune… je pouvais passer mes nuits à l’attendre mais si un jour je n’avais plus personne à attendre ? La fenêtre ne s’éclairerait plus, les volets ne se fermeraient plus, il serait parti…

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