J'ai fait des études de lettres et c'est ce qui m'a amenée à devenir prof de
français. Bon, à la base, de la hauteur (et de la betise) de mes 19 ans, j'ai fait ces études là parce que je voulais devenir écrivain. Evidemment, le jour où il a fallu travailler pour vivre,
j'ai compris que ma carrière d'écrivain de génie (qui n'avait rien écrit de valable )devait être mise entre parenthèses pour faire quelque chose de sans doute moins valorisant mais de plus
lucratif... surtout quand on entend certains ministres gratifier les enseignants de 4500 euros par mois, ça fait envie !Bien sûr, la réalité est un peu différente mais, au moins, on peut vivre
correctement.
Pourquoi écrivain ? Je ne sais pas. J'ai toujours adoré écrire. Depuis mon plus jeune âge. Sauf que je m'étais "spécialisée" dans la poésie lyrique et mélodramatique et que, faut bien admettre,
c'est pas très porteur. Dommage. Je me voyais bien en poète maudite gémissant sur mes amours perdues avant même d'être trouvées.
Un jour, toujours à l'age où on se sent très fort et très intelligent (toujours vers 20 ans quoi...), j'ai même écrit un "roman". Oui, oui, j'avais la prétention de l'appeler comme ça, en plus
!Deux personnes l'ont lu. C'était franchement pas génial mais, j'avais réussi à aller au bout.
Après ça, j'ai été très influencée par les écrivains de ce qu'on appelle "le nouveau roman" et en particulier par Nathalie Sarraute (la mère de Claude Sarraute) et je me suis essayée à ces romans
complètement déconstruits, délirants parfois, hermétiques souvent (et intellectualisants au possible). Sauf que, c'est pas si facile d'écrire comme ça et puis, faut du talent surtout !
J'ai arrêté d'écrire des textes poétiques du jour où j'ai fini par tourner en rond et aboutir à l'idée forte mais destructrice que l'écriture n'est rien, et qu'on n'arrivera jamais à dire ce
qu'on aimerait vraiment dire parce que les mots ne sont pas suffisants pour écrire ce que nous sommes, profondément.
Parfois, j'y repense à cette idée de roman mais, je ne me fais plus d'illusions. C'était un rêve de jeunesse et c'était agréable, à 20 ans, d'y croire parce qu'après tout, j'avais encore des
raisons de croire que ça pourrait arriver, tout était encore tellement ouvert, tellement possible. Tout restait à faire.
Aujourd'hui, c'est pas qu'il ne reste rien, encore heureux, mais quand même... la situation est bien ancrée et elle aura du mal à bouger. Et puis, bon, prof c'est pas si mal que ça, dans le
fond...