• Décalage, pas horaire mais générationnel...Je me dis que je ne suis vraiment plus dans le coup... A moins que le problème ne vienne pas de moi. On finit par ne plus savoir. Ce matin, en cours, je passe dans les rangs. Les élèves devaient imaginer des questions pour lesquelles ils avaient les réponses du genre "non merci", "pas du tout"... Je ne vais pas systématiquement lire ce qu'ils écrivent à chaque exercice donc, je me dis que les phrases que j'ai lues n'étaient pas de la provoc à deux balles  mais bel et bien la préoccupation unique (et limite obsessionnelle) d'une gamine de 11 ans. Ses questions étaient :

    - Veux-tu sortir avec ce mec ?

    - Es-tu jalouse de ton ex ?

    - As-tu déjà embrassé ton mec ?

    - Dans combien de temps vois-tu ton mec ?

    - As-tu plusieurs mecs en même temps ?

    11 ans... C'est une élève qui est au fond, seule sur sa table et qui ne participe jamais donc, son objectif n'était pas non plus de faire réagir la galerie. Non, vraiment, j'ai eu l'impression que pour elle c'était naturel. 

    Je sais que je ne suis pas un modèle en la matière mais, quand même, à mon époque, à 11 ans, les filles jouaient encore à la poupée... et moi avec mes playmobils... Je me sens encore plus vieille que d'habitude... et triste aussi parce que cette génération n'aura finalement pas eu d'enfance. Pas ce que j'appelle une vraie enfance, en tout cas. Non, vraiment, c'est triste... 

    Heureusement, certains garçons (et presque seulement des garçons) ont écrit des trucs du genre "Veux-tu des bonbons ?", "Regardes-tu le film avec ta maman ?"... 


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  • A tous ceux qui pensent que l'informatique est la solution d'avenir pour les élèves parce qu'il faut vivre avec son temps et gnagnagna...

    Avant les vacances, j'avais créé un exercice sur le logiciel que nous utilisons désormais pour nos notes et cahiers de textes. J'avais dit à mes élèves de 6e de tester cet exercice pour me dire si ça marchait bien. Donc, pas un truc qui leur met la pression qui les stresse à mort, hein. Juste un petit exercice où il fallait retrouver les infinitifs de verbes conjugués. 

    50% l'ont fait, en gros (oui, c'est déjà pas si mal, je sais...). Florilège des excuses invoquées :

    - l'ordinateur était en panne.

    - l'ordinateur est bien trop vieux pour ce genre de chose... (bizarre, sur mon dinosaurus du collège qui date de 2000, ça fonctionne très bien...)

    - le mot de passe ne marche pas.

    - le mot de passe est perdu.

    - l'ordinateur s'est éteint d'un coup, comme ça, quand l'exercice a commencé ! (réaction allergique sûrement...) et après, ben, ma mère a eu peur et on n'a pas réessayé (tu parles !)

    - plus d'électricité le jour J (ben oui, la tempête, quoi...)

    - pas trouvé où c'était (il y a un lien sur lequel il faut cliquer... la prochaine fois, je mettrais le logo de FB pour les attirer)

    - ma mère a pas compris alors j'ai pas pu faire (ça, c'est le pompon de la pomponnette, je trouve)

    Deux élèves m'ont dit qu'ils avaient oublié de le faire et une a préféré faire sur son cahier (comme quoi, c'est dans les vieux pots...)

    Le pire dans ces excuses qui, pour les 3/4 sont évidemment bidon, c'est que c'est tout à fait possible. Quiconque a déjà eu des démêlés avec un ordinateur sait que ça ne fonctionne pas toujours à la perfection ces machines-là. Alors, moi, l'ère du tout numérique qui arrive à grands pas, je veux bien mais il faudra bien être conscient que nos têtes blondes, brunes et rousses passeront davantage de temps à trouver la nouvelle excuse qui justifiera l'absence de boulot qu'à faire le dit boulot... Remarquez, avec les bonnes vieilles méthodes, il y a aussi plein de bonnes raisons, entre le chien qu'a tout bouffé juste le matin où il fallait rendre le travail et la p'tite cousine qui a dessiné dessus puis tout déchiré, c'était pas non plus vérifiable... mais, disons que le doute était vraiment permis et légitime. A présent, on ne pourra jamais savoir ce qui est vrai ou pas puisqu'on est bien placé pour savoir que ça peut vraiment arriver. Les pov z'enfants, vont avoir bien des misères pour faire leur travail sérieusement... 

     

    ps : et je ne vous parle pas de l'imprimante qui tombe en panne le jour où il faut rendre l'exposé, la clé usb qui a lâché ou qui est perdue pile ce jour-là, les parents qui n'ont pas eu le temps d'acheter l'encre... 

     


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  • Le pédo-psychiatre Marcel Rufo, dans sa réflexion pour améliorer l'école, propose que les parents puissent évaluer les enseignants. Et lorsqu'on lui dit qu'il joue avec le feu en lançant cette idée, il répond :

    "Non, je crois dans les enseignants, dans leur volonté missionnaire et dans leur capacité d'évoluer. Il faut arrêter de les soupçonner d'incompétence, de fainéantise, de tendance dépressive, car le soupçon alimente le soupçon chez celui qui en est victime. Ils sont un peu devenus les obligés des parents, mais ces derniers doivent être conscients que, lorsqu'ils remettent leur enfant entre les mains d'une équipe pédagogique, ce n'est pas comme confier leur gamin quelques heures aux voisins! Ils opèrent une délégation d'autorité"
    En savoir plus sur http://www.lexpress.fr/education/marcel-rufo-l-ecole-ce-n-est-pas-que-les-programmes_1295095.html#rK9Rm7U488zE0J23.99

    Je vois d'emblée une contradiction. Si les enseignants ne doivent pas être les "obligés" des parents, comment peut-on concevoir qu'ils soient évalués par ceux-ci ? En admettant que ça arrive (si j'étais croyante, je prierais tous les saints que ce ne soit jamais le cas), les enseignants deviendraient non seulement les obligés mais, pire encore, les larbins des parents ! A partir du moment où quelqu'un nous évalue, on doit lui obéir, on doit faire en sorte que ce qu'il désire soit mis en place, y compris si ça ne nous plaît pas, on doit se soumettre, on doit se plier... Comment ne plus être sous la coupe de tout en étant encore plus mis sous cette coupe avec risque de couperet par dessus le marché ?

    Il y a certains parents qui "joueront le jeu"... qui ne prendront pas la parole du gamin pour parole d'évangile, qui examineront avec un peu d'objectivité notre travail tout en reconnaissant, par ailleurs, qu'ils ne sont pas aptes à juger n'étant pas dans le métier eux-mêmes (je ne juge pas le travail de mon médecin, moi). N'oublions pas que pour évaluer il faudrait nous voir à l'oeuvre, en cours, avec 30 élèves, pas juste avec Tichouchou d'Amour comme c'est à la maison. Ensuite, il faudrait s'y connaître un minimum dans chacune des matières pour pouvoir dire si l'enseignement est de qualité ou non. Enfin, il faudrait être capable de passer outre ses propres aigreurs vis-à-vis de ses anciens profs et ça, croyez-moi, c'est pas gagné !!! Car, voyez-vous, certains adultes ne digèrent toujours pas leur prof de maths de 4e qui leur a donné un travail supplémentaire injustifié ! Même si ça se passait en 1983, pas grave, le prof de Tichouchou D'Amour en 2013 paiera pour le salopard de l'époque ! Et vlan, une mauvaise évaluation dans sa gueule à celui-là, ça lui  apprendra à vivre à lui et on fera la même chose pour ses comparses car on peut tous les mettre dans le même panier.

    Le rapport à l'école reste encore assez complexe pour certaines personnes qui semblent incapables de pardonner à ceux qu'elles considèrent comme leurs bourreaux d'antan. Il y a des parents qui ne veulent pas mettre les pieds dans une école, ou alors à reculons, simplement parce que leur propre scolarité a été chaotique, voire catastrophique ! D'autres, c'est le contraire, ils vont se sentir autorisés à fourrer leur nez partout parce qu'ils aimaient bien ou parce qu'ils ont peur que Tinamour soit maltraité comme eux l'ont été. 

    L'idée de Rufo repose sur le principe que l'évaluation peut être objective. Or, ce n'est jamais complètement le cas... pas lorsqu'il s'agit de juger le travail de quelqu'un sans aucune connaissance particulière ni expérience... ou (dans le cas des parents professeurs eux-mêmes) avec trop de connaissances et d'expérience personnelles. Ben oui... Le parent qui est prof va devoir juger son confrère, voire lui-même s'il est prof de son enfant ou ses amis s'il est pote avec le prof de son enfant  (ça, il y a pas forcément pensé non plus, Marcel !). Si je dois évaluer mes collègues, je vais prendre en compte des choses par rapport à ma propre expérience... Serais-je tout à fait objective ? Non. Pas plus que M. Dupont ou Mme Duval qui viendront me donner ma note pile le jour où j'aurais engueulé Tichouchou... eh ouais, pas de bol, le gosse aura fait le con juste ce jour-là, le jour où ses parents devaient rendre leur rapport ! Putain, 15 points de moins dans la vue !!! M'ont pas loupée, les parents de Tichouchou !

    Et puis, et puis, et puis... Tichouchou, il ne sera pas sans savoir que ses parents vont me noter. Imaginez les sourires en coin lorsque je lui ferai une remarque ou que je lui rendrai une note qu'il n'apprécie pas ! Imaginez les sous-entendus : "Oh mais madame, je suis d'accord pour faire votre exercice supplémentaire mais je pense que mes parents vous mettront quelques points en moins... enfin, moi, c'que j'en dis, hein...". Et hop, 15 points de moins encore... ou alors, j'enlève la punition de Tichouchou même s'il fout tous mes cours en l'air depuis la rentrée... 

    Résultat de l'évaluation sur le bulletin du prof (oh, j'imagine la jubilation de certains à l'idée de pouvoir noter ou au moins laisser une appréciation à des profs) : peut mieux faire, ne mérite pas son immense salaire... grosse feignasse qui donne trop de devoirs pour avoir la paix... ne sait pas s'habiller (ah ben oui, ça on y aura droit aussi, forcément... c'est dans l'air du temps)... nul, à chier, grosse s... qui a puni Tichouchou TRES injustement !... Sale prof qui a pris mon Tichéri en grippe depuis le début de l'année... Parce que faut pas se leurrer !!! C'est ça les critères de quelques parents... auxquels Rufo voudrait donner un pouvoir quand même assez phénoménal !

    Et, à l'inverse, on aurait aussi :Tinamour l'aime bien, bonne note... Donne pas trop de devoirs, bon prof... Bon goût vestimentaire (porte des marques qui plaisent à ma fille) donc bon prof... Sait rigoler avec les gamins, génial... Met plein de bonnes notes, excellent, à recommander !... Belle femme, jolie voix, parfaite, Tibébéchéri l'apprécie...Sympa, cool, bonne prof... Même si ça fait toujours plaisir quand on nous dit que l'enfant nous aime bien (pour un prof), ça reste super subjectif !!! Et surtout c'est éphémère comme tout parce que, les enfants, ils sont dans l'instant donc si tu leur as mis une bonne note, tu deviens génial et une trop bonne prof alors que si tu les engueules, t'es qu'une s... de sale p.... de prof de m..... 

    Mais, le pire c'est que je ne doute pas qu'on serait souvent mieux évalués par des parents bienveillants et compréhensifs (une majorité) que par certains inspecteurs qui n'ont eu de vrais contacts avec des élèves qu'en les frôlant dans les couloirs des établissements où ils passent. Mais, quelle objectivité ? Aucune.

    Si l'on admet que nous sommes des professionnels, ce dont on nous fait douter de plus en plus à force de nous infantiliser ou de nous décrédibiliser, nous devons être évalués par d'autres professionnels... peut-être pas objectifs non plus mais sans doute un peu plus au fait de notre mission, puisque Rufo parlait de "volonté missionnaire". Or, ce n'est pas parce que tout le monde a fréquenté les bancs de l'école que tout le monde s'y connaît en pédagogie ou didactique ou je ne sais quoi...

    Ainsi, le chef d'établissement peut évaluer certaines choses qu'il voit (pas les cours puisqu'il n'y est pas mais d'autres éléments qui sont évalués chaque année comme l'assiduité, la ponctualité, l'autorité...). L'évaluation par l'inspecteur est, à mon goût, trop subjective puisqu'il ne voit qu'une heure de cours dans les conditions de cette heure-là toujours un peu "différente". Mais, ça a le mérite d'exister et de permettre de nous évaluer. Mais pas aussi souvent que d'autres professions, assurément !

    D'où la rumeur selon laquelle les profs ne supportent pas d'être évalués parce qu'ils ont peur des résultats... Mais c'est pas ça, c'est juste que je ne vois pas comment on peut nous évaluer objectivement comme on peut peut-être le faire ailleurs (je dis peut-être parce que je n'ai pas l'outrecuidance de laisser entendre que je connais les autres corps de métiers). Le plombier, il vient, il répare bien la fuite d'eau, se montre aimable et pas trop cher, il aura beaucoup de clients satisfaits. Pareil pour plein de jobs, je crois. Le vendeur aura vendu plein de trucs et les clients reviennent contents, hop, bon boulot... 

    Prof, c'est pas quantifiable, pas comme ça en tout cas... c'est toute une alchimie qui se crée entre lui, sa matière et sa classe. En plus, c'est variable selon l'humeur des uns et de l'autre, selon le sujet abordé, selon l'heure de la journée et même, je vous jure que c'est vrai, selon la météo. Bref, c'est humain, tout simplement. Un humain (n'en déplaise à certains, le prof est un humain) face à des petits humains, plein, en construction, pas tout à fait finis qui ont chacun leur personnalité et leurs humeurs !

    Qui peut vraiment tenir compte de tout ça, c'est à dire : chose à enseigner + façon de l'enseigner + réception de la chose + humeur ou santé du prof + humeur ou santé de chaque élève (de 20 à 35/40) + événements externes divers et variés (du plus grave au plus anodin) + météo ou chaleur dans la salle??? Il y a des jours où une classe vous échappe parce qu'il s'est passé quelque chose dehors, entre les élèves, et vous n'y pouvez rien ! Il y a d'autres jours où c'est le prof qui n'en peut plus d'être là parce que dans sa vie c'est le bordel et pourtant, il doit faire cours et gérer ses élèves et leurs états d'âme à eux... mélangés aux siens ! Et, quoiqu'on dise, même si nous sommes adultes et si nous parvenons à "gérer" nos crises, ce n'est pas toujours si facile que ça !L'alchimie, parfois, est explosive ou au contraire en harmonie mais c'est assez imprévisible... et surtout inexplicable parce qu'il y a beaucoup trop de paramètres en jeu pour pouvoir tenir compte de tout et évaluer tout comme ça devrait l'être.

    Alors, hein ? Dites-moi qui peut objectivement évaluer tout ça sereinement et en toute objectivité ? Je ne crois pas que c'est possible mais, tant qu'on pensera que ça l'est et qu'il suffit de nommer des évaluateurs divers et variés pour y parvenir, on n'aboutira à rien... si ce n'est à faire péter le peu de stabilité qui existe encore !


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  • élèveCe qu'entend l'élève moyen en sortie scolaire... et probablement en cours aussi :

    "Attention, écoutez bien ! Vous allez blablablablablablablablablablablablablablabla. D'accord???Blablablablablablablablablablabla.blablabla.Après, blablablablablablablablablablablablablablablablablablablablabla. J'espère que c'est clair pour tout le monde !!! blablablablablablablablablablablablablablabla c'est important!!! Compris ?"

    Et bien sûr, la réponse à la dernière question est un "OUIIIIIIII" franc et massif !

     

    Peu importe que dans les "blablabla" il y ait une leçon de conjugaison (en cours) ou des consignes de sécurité (dehors)... Beaucoup d'élèves, de plus en plus, c'est ça qu'ils entendent ! Même quand ils semblent très attentifs !!! Alors, quand ils ne le sont pas...


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  • Ce matin, rédaction en 6e. Je demande à mes chers petits d'imaginer qu'ils se métamorphosent en un objet moderne. Ils doivent décrire cette métamorphose, expliquer comment ils en sont arrivés là et, aspect ludique, essayer de faire deviner aux autres l'objet en question sans jamais le nommer.

    Cunégonde me dit "Oui mais, par qui on peut être métamorphosé ?". Je réponds "Oh, par exemple, un voeu qui a mal tourné ou bien un truc magique...". Et là, Alfred me sort, l'air très fier de lui :"Genre vous, quoi...". Pardon ? Moi ? Euuuh. "Un truc magique" ??? Le gamin était mort de rire, forcément... Je rétorque à la petite peste coquine (c'est un élève très sympa, je précise, histoire que certains esprits chagrins n'y voient pas une marque de maltraitance professorale) que je ne sais pas comment je dois prendre l'histoire du "truc", que je ne suis pas sûre que ce soit un compliment et que, surtout, je ne vois pas trop non plus ce que j'ai de "magique"...

    Et là, j'entends la voix de la sagesse, ou de la raison ou des deux qui lance à la cantonnade :"Ben, toute façon, si elle était magique, elle s'rait pas prof, hein...".

    Pas faux mon gars, pas faux !


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